Mona Ozouf est une grande dame. Pour ArMen, Alain-Gabriel Monot l’a rencontrée, s’est entretenu longuement avec elle. Sa parole est limpide, la pensée se déroule sans accroc, comme une évidence mûrie durant ces longues années de travail et d’immersion dans les ouvrages, dans “un océan de textes”. À l’origine il y a la petite école de Plouha où sa mère enseigne. Il y a ensuite, devenue étudiante, la fascination pour la période de la Révolution française qui ne la quittera pas. Une révolution qui propose selon elle “un autre partage du possible et de l’impossible”. L’espoir d’un monde nouveau qu’il pouvait y avoir dans l’idée d’une Bretagne régénérée tant défendue par son père Yann Sohier, créateur de la revue Ar Falz, elle le retrouve dans ce temps remis à neuf que représente la Révolution française au départ. Sa vie durant, Mona Ozouf a affronté ce gouffre vertigineux, celui qui sépare l’arrivée des députés aux États généraux et le moment où ils se mettent à légiférer non seulement pour les Français mais pour l’humanité entière, en écrivant une déclaration des droits. “Ce coup de force qui transforme en Assemblée de la nation des députés qui arrivent à Versailles encore tout imprégnés de l’air de leurs ‘pays’ respectifs”, portant un cahier de doléances écrit par les paroissiens avec des revendications locales. Et puis au nom de la passion pour l’universel, ils abandonnent tout cela, s’en affranchissent. C’est cette énigme, celle du passage vers une ambition tendant à l’universel mais qui les condamne à ignorer les appartenances particulières, diverses et foisonnantes, que Mona Ozouf, fille de Yann Sohier et Anne Le Den, cherche à percer. Nous tâcherons désormais de vous convier à ces rencontres avec des regards portés sur la Bretagne d’hier, la Bretagne d’aujourd’hui et la Bretagne de demain, regards qui nous éclairent sur la place de la Bretagne dans le monde.

Questionnement repris par l’Institut de Locarn au sein duquel Tudi Kernalegenn a mené l’enquête. Qu’est-ce que l’Institut de Locarn ? Quelles sont les missions de cette association qui depuis 1994 se veut centre de prospective sur l’avenir économique de la Bretagne, lieu de rencontres, bouillonnement décentralisé ? Parole est donnée aux fondateurs et entrepreneurs qui misent sur la réflexion sur le long terme, sur la définition d’une vision pour la Bretagne dans l’univers globalisé.

Pour Jean Ollivro, sans Nantes-Saint-Nazaire, la Bretagne n’aura jamais un rayonnement maritime à la hauteur de ses ambitions. Quelle est sa place dans un monde de plus en plus “liquide” où l’on parle d’économie glaz ou bleue ? Les échanges par mer représentent 80 % de la circulation des marchandises. Notre région parviendra-t-elle à s’inscrire à nouveau dans les grandes voies de circulation maritime ? La péninsule armoricaine a le privilège de jouir de vastes bords de mer. Pour y vivre, les hommes des siècles passés ont déployé ruses et ingéniosité pour construire bassins à flot, écluses, digues, cales, murets et remblais… Les vieux ports, dits patrimoniaux, tout en transmettant une mémoire se renouvellent également. Alors tentons de resserrer les liens entre le passé et l’avenir de nos ports bretons – “richesse unique et indélocalisable que d’autres régions littorales nous envient” –, suggère Françoise Péron, femme du littoral.

Chloé Batissou

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